Élections indiennes 2024 : tout savoir sur un scrutin hors normes

À partir de ce vendredi 19 avril 2024, les Indiens sont appelés aux urnes pour élire leurs 545 députés et décider s’ils accordent ou non un troisième mandat au premier ministre Narendra Modi. Une élection en sept étapes qui mobilisera près d’un milliard d’électeurs pendant plus de six semaines. Zoom sur un scrutin gigantesque.

Près d’un milliard d’électeurs (970 millions), 44 jours de scrutin, un million de bureaux de vote installés, y compris  dans les coins les plus reculés du pays … Comme tous les cinq ans, l’Inde se prépare à des élections législatives hors normes, battant toujours ses propres records. A la clé, le renouvellement des députés de la Lok Sabha, la chambre basse du Parlement, et selon le parti majoritaire, un troisième mandat éventuel pour le Premier ministre Narendra Modi.

Le top départ de ce scrutin est donné ce vendredi 19 avril. Il s’étalera sur six semaines, soit jusqu’au 1er juin, comme l’a annoncé le 16 mars dernier le président de la commission, Rajiv Kumar, lors d’une conférence de presse. Les résultats du vote détermineront le parti majoritaire à la Lok Sabha, et donc le nom du nouveau premier ministre.

Un scrutin en sept phases et des résultats le 4 juin

Avec plus d’1,4 milliard d’habitants, selon les dernières estimations en 2021, dans un territoire d’une superficie de plus de 3 millions de km², soit six fois plus grand que la France et vingt fois plus peuplée, il est difficilement envisageable d’organiser ces élections législatives en une seule et même journée. C’est pourquoi, tout au long des 44 jours de scrutin, les électeurs seront appelés à voter par étapes, selon l’État ou le territoire où ils habitent.

Au total, sept phases de vote successives sont prévues. La première qui débutera le 19 avril, permettra aux habitants de 102 circonscriptions réparties dans 21 États de glisser leurs bulletins dans l’urne. Suivront ensuite six autres étapes, le 26 avril, le 7 mai, le 13 mai, le 20 mai, le 25 mai et le 1er juin. Pour ajouter en complexité, si certains des 29 états et sept territoires qui composent la fédération voteront en un jour, d’autres, notamment l’Uttar Pradesh, seront appelés aux urnes en plusieurs temps. Le même système électoral s’appliquera toutefois partout : un scrutin uninominal à un tour, comme au Royaume-Uni. Les résultats devraient être communiqués le 4 juin.

970 millions d’électeurs

À chacune des élections législatives, l’Inde bat son propre record. En 2019, 911,9 millions d’électeurs étaient inscrits sur les listes électorales. Pour ce scrutin 2024, ce sont quelque 970 millions de personnes âgés de 18 ans et plus, qui seront appelés à voter à partir du 19 avril. Parmi ces derniers, 18 millions de primo-votants. Un électorat crucial pour les différents partis en lice alors que 40 % de la population indienne a moins de 25 ans, selon les projections de l’ONU.

Un million de bureaux de vote

Insistant à plusieurs reprises sur la volonté de “permettre à tous de voter“, la commission électorale indienne a annoncé la mise en place de 5,5 millions de machines électroniques dans plus d’un million de bureaux de vote à travers le pays dont certains à des endroits parfois très reculés comme les montagnes de l’Himalaya, le désert du Rajasthan ou encore les îles de l’océan Indien. La loi électorale indienne précise en effet qu’aucun habitant ne doit habiter à plus de 2 km d’un bureau de vote, ce qui nécessite leur mise en place dans des zone reculées.

545 sièges mis en jeu et plus de 8000 candidats

Au total, quelque 543 sièges de la Lok Sabha, sont remis en jeu à l’occasion de ce scrutin, pour un mandat de 5 ans. Il faut y ajouter deux sièges réservés à la communauté anglo-indienne, dont les membres sont nommés par le président indien. Dans un pays longtemps dominé par le système des castes, 84 des 543 sièges renouvelés à la chambre basse du parlement, sont réservés aux candidats des castes répertoriées, les dalits (ou Intouchables), ceci afin d’assurer leur représentativité.

L’Inde comptant quelque 2 660 partis politiques enregistrés, ce sont par ailleurs plus de 8 000 candidats qui vont tenter de briguer un mandat parlementaire sous les étiquettes des différents groupes. Dans les faits, deux partis dominent l’échiquier politique indien : le Bharatiya Janata Party (BJP), littéralement le “Parti du peuple indien“ du Premier ministre sortant, Narendra Modi, et le Parti du Congrès, coalition d’une quarantaine de formations d’opposition menée par Rahul Gandhi, fils de l’ancien Premier ministre Rajiv Gandhi et de l’ancienne présidente du Congrès Sonia Gandhi,

Narendra Modi donné favori

Jamais deux sans trois ? Narendra Modi réussira t-il à décrocher un troisième mandat de cinq ans à la tête du gouvernement, dans un contexte particulièrement tendu. Le Premier ministre et son parti le BJP, mènent en effet depuis des années une politique nationaliste hindoue d’extrême droite, l’“hindutva“, très répressive à l’égard des minorités religieuses, principalement des musulmans indiens. A en croire les derniers sondages d’opinion, la coalition dirigée par son parti, le BJP, obtiendrait au moins  400 des 545 sièges au Parlement. Les sondages des télévisions prédisent en particulier sa victoire, dans les États du Nord, les plus peuplés, comme l’Uttar Pradesh, où le BJP pourrait faire une razzia sur les 80 sièges en jeu, ne laissant aucune chance à l’opposition qui mène, elle, sur les sièges du Sud, moins nombreux.

 Des sondages très favorables

Les résultats du sondage “Mood of the Nation“, une enquête menée par le groupe de médias privé India Today, ont montré que les électeurs continuent de considérer leur Premier ministre comme un leader nationaliste populaire qui a accéléré la croissance et amélioré les relations extérieures. Mené auprès de 35801 personnes à travers l’Inde entre le 15 décembre et le 28 janvier, ce baromètre indique que le parti de droite Bharatiya Janata de Modi et ses alliés pourraient remporter 335 des 543 sièges élus au suffrage direct à la chambre basse du parlement.

Selon une autre enquête pré-électorale réalisée par le Lokniti-Centre pour l’étude des sociétés en développement (CSDS), le BJP dispose d’une avance de 12% sur l’alliance d’opposition INDI.  Près de 48 % des électeurs continuent ainsi de soutenir Modi comme Premier ministre lors de l’enquête préalable au scrutin, tandis que seulement 27 % ont choisi le député du Congrès Rahul Gandhi.

Le match n’est cependant pas joué d’avance, prédit ce samedi 13 avril le quotidien The Hindu, en partenariat avec un centre de recherche. Après avoir interrogé 10 000 Indiens, il conclut que l’opposition peut résister dans d’importants États comme le Maharashtra, où elle peut faire élire 39 députés et se rapprocher de la majorité. Au-delà des projections, l’étude souligne que le chômage et l’inflation préoccupent la moitié des électeurs, loin devant les questions religieuses qui ont fait le succès du BJP.

L’Indian National Developmental Inclusive Alliance, la coalition de 41 partis d’opposition créée en 2023 pour battre Modi, peine toutefois à faire trembler électoralement le BJP. “Ces partis ont beau prêcher l’unité au niveau national, la réalité est qu’ils vont se retrouver adversaires au niveau régional [pour décider des candidats à présenter dans chaque circonscription, NDLR]”, résume Indrajit Roy, politologue à l’université d’York. “Le problème tient à leur incapacité à trouver des compromis“, ajoute t-il. Narendra Modi reste le candidat favori des Indiens pour être le prochain Premier ministre, même si l’écart avec son rival potentiel, Rahul Gandhi, se resserre.

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