Elisabeth Borne rend sa feuille de route

Elisabeth Borne rend ce vendredi sa feuille de route pour les prochains mois et ses propositions sur un prochain “gouvernement d’action“ à Emmanuel Macron, de retour d’une longue séquence à l’étranger. Un rendez-vous sous forme de “crash test“ pour la cheffe du gouvernement, tant la mission semble ardue. Le cahier des charges et les enjeux.

Elisabeth Borne a rendez-vous ce jour avec le chef de l’État. Après son retour du Portugal jeudi, Emmanuel Macron attend les propositions de sa Première ministre, “pour une feuille de route“ et “la composition d’un nouveau gouvernement“, selon la consigne donnée par lui avant son départ, à la cheffe du gouvernement. A la clé de ce rendez-vous, deux objectifs : évaluer la marge de manœuvre dont dispose l’exécutif, en l’absence de majorité absolue et remettre au chef de l’État des propositions pour le remaniement à venir.

Le cahier des charges

Une feuille de route “pour les prochains mois“

Avant d’entreprendre sa longue séquence internationale, Emmanuel Macron avait demandé à la Première ministre, de sonder les groupes politiques à l’Assemblée nationale pour évaluer la marge de manœuvre dont dispose l’exécutif, en l’absence de majorité absolue. Autrement dit, établir un agenda des réformes, en déterminant les alliés sur lesquels s’appuyer pour atteindre la majorité absolue (289 voix sur 577), et ceux susceptibles d’entrer au gouvernement, en échange de leur coopération.

Une mission ardue pour la locataire de Matignon, au vu des premières réactions des groupes parlementaires de l’opposition. Alors que le président a exclu la possibilité de nouer un accord avec le Rassemblement National (RN) et La France Insoumise, leurs responsables ont à l’unanimité fait savoir leur refus de bâtir un accord de gouvernement ou une coalition de long terme avec l’exécutif. A charge pour la Première ministre de sonder les groupes d’opposition pour savoir s’ils étaient prêtes à passer “des accords de gouvernement, avec ou sans participation“. Elle devait aussi établir les positions des groupes sur “les principaux textes de loi qui vont jalonner les prochains mois“.

Elisabeth Borne a rencontré les groupes de la majorité lundi, puis Les Républicains, EELV, le PCF et le PS mardi, et mercredi, le RN et LFI. Mission impossible pour certains ou simulacre de consultations pour d’autres, le tour de table en tout cas est terminé. L’espoir d’une quelconque coalition au-delà de la majorité relative ayant été évacué assez rapidement, les discussions se sont focalisées sur le “cas par cas“. C’est-à-dire concrètement, la possibilité pour le gouvernement de faire voter des textes avec l’aide, ou avec l’abstention des députés de l’opposition.

Une tâche compliquée au regard du laps de temps très restreint accordé à Mme Borne, alors que, dans d’autres pays européens, la construction d’un contrat de gouvernement peut durer des mois. La faute, également, au système politique français.  “La difficulté, c’est que nos institutions de la Ve République ne sont pas faites pour le compromis“, souligne dans Le Monde la députée Renaissance de Maine-et-Loire Stella Dupont.

L’esquisse d’un futur gouvernement

Élisabeth Borne doit également remettre au chef de l’État ses “propositions“ pour le remaniement à venir. Et ce dernier devrait aller bien au-delà du simple ajustement technique initialement envisagé. L’attente prochain gouvernement devrait être plus courte qu’après l’élection présidentielle. La balance pencherait pour que la Première ministre fasse des annonces avant son discours de politique générale devant le Parlement, prévu pour mercredi. Ce qui correspondrait à l’annonce faite par le chef de l’état d’un nouveau gouvernement “dans les premiers jours du mois de juillet.

Même sans accord de gouvernement, l’élargissement de l’exécutif pourrait inclure des figures de la droite ou de la gauche. D’abord chez LR, où de potentiels candidats parmi les quelques Macron-compatibles restant dans le parti, attendent le “feu vert“ présidentiel pour franchir le Rubicon. Le président devra aussi répondre aux ambitions de ses alliés au Modem et chez Horizons.

Veiller à la parité

Outre le recrutement de profils solides, Elisabeth Borne va devoir composer avec quelques difficultés supplémentaires pour la formation de ce nouveau gouvernement. En premier, la question de la parité mise à mal par les défaites de trois femmes ministres aux législatives -Amélie de Montchalin, Brigitte Bourguignon, Justine Benin- et l’élection de l’une d’elles au perchoir de l’Assemblée, Yaël Braun-Pivet. Or Emmanuel Macron s’est jusqu’alors efforcé de respecter la parité dans ses précédents gouvernements.

Jeu de sièges musicaux

Autre paramètre de l’équation du remaniement, pointée par un cadre de la majorité joint par l’AFP : toute nomination de députés au gouvernement réduirait le nombre de députés de la majorité dans l’hémicycle lors d’un éventuel vote de confiance mercredi, dont la tenue n’a pas encore été tranchée par l’exécutif. Les suppléants n’auront pas encore eu le temps de replacer les députés ainsi promus. Une des options sur la table, serait donc de procéder à un remaniement “en deux temps“, avec dans un premier temps le remplacement des ministres sur le départ et l’annonce de possibles ralliés. Puis les secrétaires d’Etat, qui ne devaient pas être nommés avant les législatives, dans un second temps.

L’épineux cas Abad

Élisabeth Borne va par ailleurs devoir trancher sur le sort de Damien Abad , visé lundi par une troisième plainte pour violences sexuelles.  “Il devrait lui-même se retirer“, tempête un cadre de la majorité qui pointe aussi “l’absence de portage politique“ des dossiers du ministre des Solidarités, de l’Autonomie et des Personnes handicapées. 

De ce bilan général dépendra notamment la décision d’Élisabeth Borne de se soumettre, ou non, à un vote de confiance des députés, à l’issue de son discours de politique générale. Prévue le 6 juillet prochain, cette intervention constituera le premier vrai test grandeur nature pour la première ministre.

 

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