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Assistants parlementaires du RN : le tribunal correctionnel de Paris rend sa décision
31 mars
Ce lundi 31 mars, le tribunal correctionnel de Paris annoncera s’il suit ou non les réquisitions du parquet à l’encontre de Marine Le Pen, menacée d’une peine d’inéligibilité immédiate, synonyme d’incapacité à se présenter à la Présidentielle en 2027. Ce qui rebattrait les cartes du jeu politique.
Le parti à la flamme retient son souffle. Lundi 31 mars, à 10 heures, le jugement de la 11ème chambre du tribunal correctionnel de Paris tombera, dans l’affaire des assistants parlementaires fictifs du Front national, devenu le Rassemblement national (RN). Le juge judiciaire confirmera alors, ou non, la peine d’inéligibilité de 5 ans requise par le parquet, avec exécution provisoire. La triple candidate à la présidentielle, pourrait alors être empêchée de se présenter en 2027.
“On est dans une situation complètement inédite sous la Ve République, dit le politologue Luc Rouban, directeur de recherche au Centre national de la recherche scientifique. On n’a jamais vu ça, qu’un leader d’une grande force politique en pleine progression électorale ne puisse pas se présenter. Ce serait un coup de tonnerre. Ce serait considéré comme un tournant décisif pour l’élection présidentielle.“
Dans ce procès, qui s’est tenu à Paris en novembre, plusieurs cadres ou ex-cadres de la formation d’extrême droite, dont leur cheffe Marine Le Pen (MLP), étaient sur le banc des accusés. A la suite d’une longue procédure, le parquet a requis une peine de cinq ans de prison (dont deux fermes), 300 000 euros d’amende et une inéligibilité de cinq ans pour Me Le Pen. Mais le plus important est que le parquet a aussi requis l’“application provisoire“ de cette peine. Ce qui concrètement signifie qu’elle s’appliquerait même si la cheffe historique du RN faisait appel et donc avant même que le jugement définitif soit rendu. La candidate serait donc disqualifiée pour 2027. La mort politique de MLP serait alors prononcée suggérait l’un de ses plus proches conseillers et “Il y aura un avant et un après“. Le danger est immense… et rien n’est prêt, à en croire les lepénistes sondés par Politico la semaine passée.
Un sujet “tabou“ au RN
Depuis son tonitruant 20 Heures sur TF1, deux jours après les réquisitions du parquet, la cheffe du groupe RN à l’Assemblée ne s’est quasiment pas exprimée, ni publiquement, ni en interne. Elle a évoqué l’affaire, mercredi dans Le Figaro, mais surtout pour mieux faire la démonstration de sa préparation inébranlable à la prochaine présidentielle. Et a semblé confirmer son choix de l’improvisation : “ Vous savez, la peur n’écarte pas le danger, déclare t-elle“. Et d’ajouter : “Je ne vois pas l’intérêt de supputer à l’avance. J’attendrai de voir quel est le verdict et puis je prendrai ma décision en fonction de ce verdict.
Les mantras de la patronne du parti à la flamme – “Le combat judiciaire fait partie du combat politique“, “la peur n’écarte pas le danger“, “je n’y pense pas du tout“, n’ont guère tempéré la fébrilité de ses troupes. “Le 31 mars, c’est le saut dans le vide“ dit un de ses lieutenants, qui tente de s’accrocher à la réalité, mais qui ne veut pas céder au désespoir. Au sein du RN, des proches de Marine Le Pen sont aussi dans le déni, réel ou feint. Le premier d’entre eux est Jordan Bardella. “Je ne suis pas inquiet parce que Marine Le Pen est totalement innocente dans cette affaire“, déclare le président du RN à chaque interview.
La perspective d’un empêchement d’une quatrième candidature à la présidentielle de Marine Le Pen en 2027, reste néanmoins une perspective aussi redoutée que tue. Le sujet est tabou au RN, surtout près de la présidente du groupe à l’Assemblée nationale, qui refuse qu’on lui en parle. Tout aussi tabou, le passage de relais à Jordan Bardella, si son élimination de la course à l’Elysée était actée. Un conseiller paraît ainsi temporiser les ardeurs de ceux qui imaginent le jeune homme enfiler immédiatement le costume de candidat : “S’il faut un plan B, ça se réfléchit. Pour le moment, Bardella, c’est un plan Premier ministre. Faire une présidentielle, ça mérite un récit, une équipe étoffée, c’est autre chose“, déclare t-il.
#Politique ⚖️ En attendant le jugement de @MLP_officiel qui risque une peine d’inéligibilité, le RN cache mal sa fébrilité. La décision du tribunal correctionnel de Paris dans l’affaire des assistants parlementaires du parti est attendue lundi. La perspective redoutée d’un… pic.twitter.com/SYI838nKeh
— L'Echiquier social (@EchiquierSocial) March 29, 2025
Le Conseil constitutionnel rend une décision sans impact
Coïncidence, vendredi, le Conseil constitutionnel examinait un cas semblable. Celui de Rachadi Saindou qui contestait sa peine d’inéligibilité “assortie d’une exécution provisoire“. Certains attendaient beaucoup de cette décision au sujet d’une question prioritaire de constitutionnalité (QPC). Elle s’est en fait révélée sans impact pour Marine Le Pen. Prudents, les Sages de la rue Montpensier ont décidé de se tenir prudemment sur les bords de l’arène politique et de ne surtout pas, par leur décision, influencer le cours de l’histoire judiciaire.
Dans une décision de huit pages, le Conseil constitutionnel ne consent qu’une réserve d’interprétation, se contentant de ne répondre qu’à la question posée par l’élu mahorais et ses avocats. A savoir : la compétence du préfet à démettre de ses mandats un élu local condamné à de l’inéligibilité avec exécution provisoire, porte-t-elle atteinte au droit de l’éligibilité et de la liberté de l’électeur, garantis par la déclaration des droits de l’homme et du citoyen. Concernant, l’exécution provisoire d’une peine d’inéligibilité, le Conseil émet “une réserve d’interprétation“, estimant qu’il “revient au juge, dans sa décision, d’apprécier le caractère proportionné de l’atteinte que cette mesure est susceptible de porter à l’exercice d’un mandat en cours et à la préservation de la liberté de l’électeur“.
Procès des assistants RN : le Conseil constitutionnel rend une décision sans impact pour Marine Le Pen
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— Public Sénat (@publicsenat) March 28, 2025
Un malaise perceptible dans la classe politique
Poursuivie pour des faits de “détournement de fonds publics“ et de “complicité de détournement de fonds publics“, la cheffe des députés RN encourt une peine de cinq ans de prison, dont trois avec sursis, et une amende de 300 000 euros, si l’on s’en tient aux réquisitions du parquet. Elle risque surtout une peine de cinq ans d’inéligibilité avec exécution provisoire qui pourrait l’empêcher de se présenter à l’élection présidentielle de 2027. “C’est ma mort politique qui est réclamée“, avait réagi l’intéressée, en novembre 2024.
Depuis décembre 2016, la loi relative à la transparence et à la lutte contre la corruption, dite “loi Sapin 2“, rend l’inéligibilité obligatoire dans les cas de corruption. Quant à l’exécution provisoire, qui invaliderait la candidature de Marine Le Pen, elle est habituellement requise lorsqu’il y a risque de récidive et de menace à l’ordre public. Et le malaise dans cette affaire est perceptible dans la classe politique. Le ministre de la Justice, Gérald Darmanin, a beau être un adversaire farouche de Marine Le Pen, il a soutenu que “si cette décision venait à être confirmée, ce serait une atteinte grave à la démocratie“. Même son de cloche du côté du premier ministre qui a jugé ce procès “injuste“.
François Bayrou, lui-même en attente d’un procès en appel sans date fixée, dans une affaire similaire, juge très “dérangeante“ cette possible peine d’inéligibilité à application immédiate, même en cas d’appel. Si la triple candidate à la présidentielle est empêchée de concourir au scrutin de 2027, plusieurs membres de la coalition gouvernementale redoutent une “trumpisation“ de ses électeurs. En privé, le chef du gouvernement s’en est récemment ému : “Si Marine Le Pen ne peut pas se présenter, il y a un risque de choc dans l’opinion.“ Voire celui d’une crise politique, estiment certains de ses soutiens.
Présidentielle 2027 : si Marine Le Pen ne peut pas se présenter, François Bayrou craint un «choc» dans l’électorat. Par @lboichothttps://t.co/lKDDZ0neqI
par @Le_Figaro— Marie-Cécile Renault (@Firenault) March 30, 2025