Quelque 60 millions d’Allemands sont appelés aux urnes ce dimanche pour les législatives, pour renouveler le Bundestag dont la majorité désignera ensuite le prochain chancelier fédéral. Mode d’emploi, enjeux, possibles coalitions. Ce qu’il faut savoir sur ce scrutin.
Après quatre mandats et 16 années de règne sur l’Europe, la chancelière allemande, Angela Merkel s’apprête à quitter la scène. Ce dimanche 26 septembre, les Allemands des 16 Länder (régions) sont appelés aux urnes pour les élections législatives, afin de désigner son ou sa successeur.
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Un mode de scrutin mixte
Les allemands ne votent pas directement pour élire leur chancelier ou chancelière, comme c’est le cas en France pour l’élection du président de la République. Les électeurs Outre-Rhin élisent en effet tous les quatre ans leurs députés, membres du Bundestag (chambre basse), l’équivalent de l’Assemblée nationale française. Ce sont ensuite ces mêmes députés qui élisent le chancelier ou la chancelière. Le système électoral allemand, complexe, combine un vote uninominal majoritaire et vote à la proportionnelle de liste. Concrètement, chaque électeur dispose de deux voix. La première lui permet de choisir directement le député de sa circonscription. Le candidat arrivé en tête est élu. La moitié du Bundestag est élue de cette manière, c’est-à-dire 299 députés.
La deuxième voix dont dispose l’électeur lui permet de voter pour une liste électorale. Elle lui donne la possibilité de désigner au système proportionnel les 300 autres députés environ. Ce vote est sans doute le plus important, car il détermine la composition finale du Bundestag. Pour siéger, un parti doit remporter au moins 5 % des voix de ce vote. Une fois élu, le parti majoritaire, arrivé en tête du scrutin proportionnel, devra former une coalition pour créer une majorité avec un ou deux autres partis. Une fois validée, ce sera elle qui élira le nouveau chancelier.
Les principaux prétendants au titre
Ils représentent les trois grands partis allemands et sont en lice sont pour devenir le futur chancelier ou chancelière d’Allemagne.
Olaf Scholz-63 ans : le “donné favori“
A trois jours des élections générales allemandes, Olaf Scholz (SPD), l’actuel ministre des finances et vice-chancelier du gouvernement de coalition d’Angela Merkel, fait figure de favori. Encore à la traîne il y a encore quelques mois, le candidat du SPD est en train de créer la surprise, réalisant jusqu’ici un sans-faute, là où adversaires ont multiplié les bévues. Vainqueur selon les sondages des précédents débats, il joue la carte de la compétence et de l’expérience, à la différence de ses deux rivaux qui n’ont jamais été membre d’un gouvernemental national. Il a aussi su jouer de sa position de ministre des finances d’Angela Merkel pour se forger une réputation de leader politique capable d’être à la hauteur des crises. C’est ainsi que le vice-chancelier est devenu l’homme du “quoi qu’il en coûte”“ à l’Allemande pour faire face à la pandémie de Covid-19.
Habitué des “comeback“ improbables, il semble être le favori par défaut. “Le candidat à la peine“. Le SPD semble d’ailleurs avoir opté pour lui à contrecœur. S’il a été désigné candidat, les militants ne sont pas tendres avec lui, lui reprochant d’être trop à droite. Ce qui lui vaut d’ailleurs d’être nommé “Vati“ (“papa”) par la presse allemande, en référence à “Mutti“ (maman”), le surnom d’Angela Merkel. Son manque de charisme est également pointé du doigt en Allemagne où le candidat a longtemps été surnommé “Scholzomat“, une contraction entre le nom du candidat et “automat“, pour sa manie de répondre comme un robot aux questions.
Armin Laschet-60 ans : l’héritier
Issu du même parti que la chancelière, le parti chrétien-démocrate (CDU), Armin Laschet a été pendant de longs mois en tête des élections générales allemandes. Les premiers sondages donnait en effet le CDU favori devant les sociaux-démocrates (SPD) et les écologistes. Mais après sa désignation comme candidat officiel du parti en avril dernier, la campagne de l’actuel président de la Rhénanie-du-Nord-Westphalie est devenue plus laborieuse, voire complètement “ratée“, selon un éditorial du magazine Der Spiegel. Malgré le plein soutien d’Angela Merkel, le candidat de la CDU a toutes les peines à s’imposer et reste un candidat impopulaire, en dehors comme en interne chez les conservateurs.
À 60 ans, le dirigeant de la région allemande la plus peuplée, la Rhénanie du nord Westphalie multiplie les bévues, comme lors de son déplacement, au chevet des victimes des inondations en Allemagne. On y a vu Armin Laschet hilare durant un discours empreint de gravité du président allemand, Frank-Walter Steinmeier.
Hab's mal groß gemacht. #Laschet findet Flutkatastrophen offenbar recht witzig. 🤦♀️ pic.twitter.com/5Jvj5dgdya
— Susannne (@susannnesorgen) July 17, 2021
Plus récemment, la diffusion d’un clip de campagne le montrant en pleine discussion avec un antivax qui l’avait pris à partie lors d’un discours, a elle aussi provoqué l’indignation des différents partis politiques, comme le relate Le Monde.
A qq jours des élections fédérales qui se tiendront dimanche en Allemagne 🇩🇪, l'écart s'est encore resserré entre ls sociaux-démocrates d'Olaf Scholz (SPD), légèrement en tête (25%) et les chrétiens-démocrates d'Armin Laschet (CDU/CSU), crédités de 23%, selon 1 sondage @ZDFheute pic.twitter.com/xrGPP9ImCA
— L'Echiquier social (@EchiquierSocial) September 23, 2021
Les coalitions
Annalena Baerbock-40 ans : la chance des Verts ?
Elle est la première candidate écologiste à faire partie des favoris dans la course au poste de chancelier. Elle est aussi la seule femme, et la plus jeune, parmi les candidats des trois principales formations politiques. Relativement inconnue avant son élection à la vice présidence du parti écologiste, Annalena Baerbock a depuis réussi à convaincre. Ses détracteurs, à l’instar du conservateur de la CDU Friedrich Merz, l’accusent de manquer d’expérience gouvernementale, mais elle reste convaincue qu’elle est la bonne personne pour succéder à Angela Merkel. “Non, je n’ai jamais été chancelière, ni même ministre. Mais je suis pour le renouveau“, a-t-elle déclaré après que les Grünen, les Verts, l’aient désignée comme leur principale candidate pour les élections de 2017.
C’était toutefois sans compter avec une succession de scandales venues ternir sa réputation au coeur de l’été. Falsification de son CV, plagiat présumé dans un livre qu’elle a publié, primes non déclarées, ont entraîné une dégringolade du parti écologiste dans les sondages au cours des derniers mois.
L’écart se resserre
Les candidats en lice pour succéder à Angela Merkel se sont affrontés jeudi lors d’un dernier débat télévisé, alors que les sondages montrent que la course se durcit à trois jours des élections fédérales allemandes. Un sondage FGW pour “ZDF“ a montré un soutien à l’alliance conservatrice CDU/CSU, dont le candidat Armin Laschet, est en hausse d’un point à 23%. Les sociaux-démocrates s’accrochent à leur avance, mais de justesse. Le sondage place le candidat du SPD, le ministre des finances, Olaf Scholz, inchangé à 25 %. Les Verts, susceptibles de jouer un rôle au gouvernement, ont progressé quant à eux d’un demi-point à 16,5% et les Démocrates libres (FDP) pro-business sont stables à 11%.
2 jours avant la #Bundestagswahl, les élections législatives allemandes qui se tiendront ce dimanche, le baromètre @ZDFheute montre une situation politique tendue. Les écarts se resserrent entre les 3 formations politiques #btw21 pic.twitter.com/Vwob2gt3hw
— L'Echiquier social (@EchiquierSocial) September 24, 2021
A quelques heures des élections, la chancelière n’a pas hésité à venir soutenir son poulain, le conservateur Armin Laschet, poussant les électeurs à choisir son héritier, et la CDU.
Quelles possibles coalitions ?
Elections fédérales allemandes : Mickey Mouse, feux tricolores, Jamaïque… On vous résume les possibles coalitions de l'ère post-Merkelhttps://t.co/Ep8kWroEWU pic.twitter.com/3yUv7u3Wjt
— franceinfo (@franceinfo) September 22, 2021
La coalition “Jamaïque“
Si la CDU, le parti chrétien-démocrate, arrive en tête, elle pourrait pousser pour une coalition avec les libéraux et les Verts. C’est le scénario “Jamaïque“ ou “noir-jaune-vert“, en référence à la couleur associée à chacun des partis. Cette union pourrait notamment voir le jour en cas de victoire d’Armin Laschet, le candidat conservateur en course, ou d’Olaf Scholz.
La coalition “Mickey Mouse“
Cette coalition composée de noire, jaune et rouge (les couleurs de la souris Mickey Mouse) réunirait la CDU (conservateurs), la FDP (libéraux) et la SPD (sociaux-démocrates). Ce scénario serait notamment envisageable en cas de victoire d’Armin Laschet ou d’Olaf Scholz. Une telle coalition permettrait de réunir une large majorité centriste au Bundestag. Mais elle conduirait nécessairement, comme le note france info, à un accord de gouvernement entre la gauche et la droite. Une option que rejette radicalement la SPD et les Verts.
La coalition “feux tricolores“
Cette alliance rouge-jaune-verte correspondrait à un accord de gouvernement entre le SPD, les libéraux du FDP et les Verts. Considérée comme probable en cas de victoire du social-démocrate Olaf Scholz, elle se traduirait par une majorité assez large au Bundestag. Reste que les les différences idéologiques entre les trois formations devraient rendre les négociations difficiles, en raison notamment des divergences des deux partis sur les questions d’imposition et de déficit.
La coalition “R2G“
L’idée d’une alliance entre les sociaux-démocrates du SPD (rouge), la gauche de Die Linke (rouge) et les Verts commence à faire son chemin en cas de victoire d’Olaf Scholz. Du fait du recul de l’Union chrétienne-démocrate (CDU) d’Armin Laschet dans les sondages, cette alliance rouge-rouge-verte apparaît en effet désormais possible à l’issue de l’élection de ce dimanche du Bundestag.
Une telle coalition reste toutefois improbable, pour ne pas dire impossible, car Olaf Scholz n’est pas l’homme de la situation pour gérer quatre années de lutte interne à gauche. Et parce qu’une grande partie du SPD a encore beaucoup de mal à accepter le frère jumeau renégat (Die Linke). Le souhait de Die Linke, considéré comme un parti d’extrême gauche par Armin Laschet (CDU), de sortir de l’Otan risque fort, dans tous les cas, de compromettre cet éventuel accord.
La coalition “Kenya“
Un regroupement du SPD, de la CDU-CSU et des Verts pourrait également être une possibilité, connue sous le nom de coalition “Kenya“, car les couleurs correspondraient au noir, rouge et vert du drapeau de ce pays. Une telle alliance est toutefois peu probable car elle impliquerait un score très faible des deux favoris : Olaf Scholz, pour le SPD et, Armin Laschet pour la CDU.