Mobilisation des agriculteurs : acte 2

Près d’un an après une précédente mobilisation historique, les principaux syndicats agricoles annoncent de nouvelles actions dès le début de la semaine. Un mouvement qui pourrait s’étendre jusqu’à la mi-décembre, pour dénoncer les contraintes imposées aux agriculteurs, demander un soutien sur la question du revenu, et s’opposer à la possible signature d’un accord entre l’Union européenne et le Mercosur.

Vers un “acte 2 de la révolte agricole“ ? C’est la menace que brandissent les agriculteurs qui se remobilisent ces jours-ci dans plusieurs départements, à travers l’Hexagone. Moins d’un an après la dernière gronde agricole qui avait secoué le pays, les principaux syndicats agricoles ont annoncé de nouvelles actions pour réclamer des garanties sur la pérennité de leurs exploitations, mais surtout s’opposer fermement à la possible signature par l’UE, d’un accord de libre échange avec les pays latino-américains du Mercosur.

Un appel généralisé à la mobilisation

Mercredi 13 novembre, le président de la Fédération nationale des syndicats d’exploitants agricoles (FNSEA) et son homologue des Jeunes Agriculteurs (JA) ont lancé un appel à une mobilisation nationale “à partir de lundi“, pour “attirer l’attention des pouvoirs publics“ et demander du “soutien“. Ce mouvement va “durer jusque mi-décembre “ avec des manifestations ponctuelles dans les départements, pour dénoncer des traités de libre-échange, les “contraintes“  imposées aux agriculteurs et demander un soutien sur “la question du revenu“. “On sera dans tous les départements à partir de lundi pour quelques jours, pour faire entendre, au moment du G20 au Brésil, la voix de la France“, a précisé le patron de la FNSEA, Arnaud Rousseau, lors d’une conférence de presse, précisant que la mobilisation pourrait repartir si besoin “en janvier“ 2025.

Le deuxième syndicat, la Coordination rurale (CR), prévoit quant à lui des actions à partir du 19 novembre. “L’idée est de bloquer différents points stratégiques : plateformes logistiques, centrales d’achat, ports… On veut montrer à nos gouvernants et à la population que sans agriculteurs, il n’y a pas d’alimentation qui rentre dans les magasins“, a expliqué François Turpeau, président de la Coordination rurale de la Vienne. La Confédération paysanne, héritière des luttes altermondialistes, prévoit, elle aussi, des actions.

Les raisons de la colère

Invité de la matinale de TF1, mercredi 16 octobre, Arnaud Rousseau, est revenu sur les raisons de la gronde, qui selon ses mots n’est pas de retour mais “n’est jamais partie“. Pour lui, les engagements gouvernementaux n’ont en effet toujours pas été tenus. “On nous a fait des promesses. Que les promesses soient tenues, c’est normal ! “, a martelé le patron de la FNSEA.

La crainte d’un accord avec le Mercosur

Le traité de libre-échange entre l’UE et le Mercosur, qui doit être de nouveau sur la table des discussions lors du G20, qui démarre lundi au Brésil, cristallise le mécontentement des agriculteurs. Cet accord discussion depuis 20 ans n’a pas encore été appliqué et les négociations sont toujours en cours, mais l’UE semble déterminée à le signer définitivement d’ici la fin de l’année. La France fermement opposé à sa ratification, mais isolé en Europe, cherche à composer une minorité de blocage au niveau européen, pour bloquer son application. C’est plus particulièrement le volet alimentaire de la dernière version du texte, établie en 2019, qui inquiète particulièrement les agriculteurs français. Il prévoit notamment un quota d’importations de viande bovine latino-américaine de quelque 90 000 à 100 000 tonnes par an. “L’Europe ne doit pas être une passoire et elle ne peut pas importer des produits qui ne respectent aucun de nos standards“, plaide M. Rousseau.

Les revenus : un sujet prioritaire

Comme sur l’accord avec le Mercosur, les syndicats sont unanimes quant à l’urgence d’agir sur le revenu des agriculteurs. La FNSEA, la Coordination rurale et la Confédération paysanne, qui ont déjà mené des actions localement en octobre, entendent mettre la pression sur le gouvernement.

Une succession de crises

Depuis le mois d’août, Jeunes Agriculteurs et la FNSEA demandaient un appui spécifique et rapide pour les agriculteurs qui doivent faire face à une année exceptionnelle, tant sur le plan climatique que sanitaire, aux conséquences désastreuses sur les récoltes et les cheptels. Le 5 novembre, la nouvelle ministre de l’Agriculture, Annie Genevard, a fait des annonces à destination des agriculteurs en difficulté, sous la forme de prêts garantis par l’État à court et moyen terme. De premières mesures saluées par les agriculteurs, qui se sont félicités de leur traduction concrète par les annonces faites le 15 novembre par Me Genevard. Ils demandent maintenant au Gouvernement que ces mesures soient mises en place de manière urgente au niveau local et continuent de porter la demande d’un accompagnement spécifique via le FAC (fonds d’allègement des charges) pour évaluer les situations les plus complexes et les accompagner de manière plus appuyée.

Quelles formes d’actions ?

Cette mobilisation, qui débutera devant les préfectures et sur des ronds-points, devra être “responsable“, sans violence, et cesser à la mi-décembre pour “ne pas prendre en otage la période de Noël, une période de consommation de[s] (…) produits“ des agriculteurs français, a déclaré Arnaud Rousseau, “On veut interpeller les pouvoirs publics : on ne cible pas les autoroutes. On n’est pas là pour ennuyer les Français, encore moins les affamer comme d’autres syndicat ont pu l’évoquer”, a déclaré le patron de la FNSEA. Notre objectif est de faire pressions sur les pouvoirs publics pour faire en sorte que nos revendication autour de la dignité du métier, du  revenu, de la simplification et de la promotion de la souveraineté alimentaire, soient entendues“, a t-il ajouté lors d’une conférence de presse, le 13 novembre dernier.  Si les deux syndicats ne prévoient pas pour l’heure de bloquer les autoroutes, comme cela avait été le cas cet hiver, ils seront “sur les ronds-points et boulevards d’Europe pour dénoncer cette incohérence européenne déclenchée par l’annonce du Mercosur “ a promis sur RTL, Pierrick Horel, président du syndicat Jeunes Agriculteurs.

Les agriculteurs ont déjà commencé à se mobiliser jeudi 14 novembre dans plusieurs départements de la région, comme l’Ain et la Drôme ou encore, les Bouches-du-Rhône le 15 novembre. Des manifestations sont programmées pour le début de la semaine dans la plupart des régions comme le recense le quotidien Libération.

A quoi faut-il s’attendre ?

Dès ce dimanche, les tracteurs vont reprendre la route. Des actions sont ainsi annoncés dans l’Ouest de l’Ile-de-France, où la préfecture des Yvelines a précisé qu’une centaine de tracteurs convergeraient dimanche de Houdan et de Longvilliers, dans les Yvelines, ainsi que d’Etampes et d’Auvernaux (Essonne), pour se rassembler sur la RN118, à hauteur de la base aérienne de Vélizy-Villacoublay, où les sections locales de la FNSEA et des Jeunes agriculteurs ont annoncé qu’elles “adresseront un message au président de la République“, dès ce dimanche 17 novembre.

A l’appel de l’alliance syndicale majoritaire FNSEA-Jeunes agriculteurs, des mobilisations sous des formes diverses sont annoncées, dès lundi et mardi, dans toute la France. Convois de tracteurs, rassemblements, blocage du fret… Elle prendront différentes formes. Dans de nombreux départements, la colère s’exprimera sur des ronds-points. Ce sera notamment le cas, en Isère, dans les Côtes-d’Armor, ou encore en Occitanie, où le Centre presse de l’Aveyron, liste les mobilisations dans les différents départements de la région. La Coordination rurale promet pour sa part, de bloquer le fret alimentaire dès mercredi. “Nous irons devant les préfectures le 19 novembre pour rappeler nos revendications”, a annoncé vendredi sa présidente, Véronique Le Floc’h, à Ouest-France. “Si nos demandes restent sans réponse, à partir du 20 novembre, nous allons bloquer le fret alimentaire“, ajoute t-elle.

 

 

Classé dans L'Agenda politique.

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *