Réforme des retraites : 7000 amendements à “passer au tamis“

Le projet de réforme des retraites du gouvernement arrive ce lundi à l’Assemblée nationale. Plus de 7000 amendements, dont près de 6000 pour la Nupes, ont été déposés en vue de son examen par la commission des affaires sociales. Si la plupart vise à s’opposer en bloc au report de l’âge légal de départ à la retraite, d’autres suggèrent des alternatives au projet de l’exécutif. Le point sur les propositions des différents groupes.

La bataille s’engage au Parlement. A partir de ce lundi 30 janvier l’Assemblée nationale se penche sur la réforme hautement inflammable des retraites. Le projet de financement rectificative de la Sécurité sociale (PLFRSS) pour 2023, qui porte cette réforme arrive en commission des affaires sociales. Près de 7 000 amendements, dont plus de 5950 de la Nupes ont été déposés en vue de l’examen du texte. Très précisément 7241 qui compromettent la possibilité pour les députés de mener à bien l’examen du texte dans sa totalité, avant son arrivée dans l’hémicycle, le 6 février prochain.

Près de 6000 amendements pour la Nupes

La France Insoumise (LFI) n’a certes pas reproduit sa démarche d’obstruction massive de 2020. Le groupe avait alors déposé à lui seul, 19 000 amendements en commission et 23 000 en séance, contre la précédente tentative de réforme des retraites. Pour autant, LFI est le groupe qui a déposé le plus d’amendements : quelque 3345. Il est suivi du groupe écologiste avec 1 282 amendements et du groupe socialiste avec 1053 amendements, à l’exception des communistes (272). “Nous avons déposé ces amendements afin de disposer du temps nécessaire pour mettre en lumière l’immense régression sociale imposée par cette réforme“, expliquent les députés Nupes dans un communiqué conjoint.

L’article 7 dans le viseur

Cette rafale d’amendements à gauche se concentrent sur l’article 7 du projet de loi, pour s’opposer en bloc au report de l’âge légal de départ à la retraite à 64 ans. Certains autres pourraient être retirés. “On va adapter notre tactique au fur et à mesure, on veut que soit discuté l’article 7″“ sur l’âge, souligne l’insoumise Clémentine Autain. De multiples amendements des partis de la Nupes vise aussi à supprimer l’article 1 du projet de loi qui prévoit la fin de la plupart des régimes spéciaux. C’est aussi le cas d’amendements de députés RN ou LR.

LR fait monter les enchères

De l’autre côté de l’hémicycle, le groupe Les Républicains (LR) porte un total de 617 amendements. Les 62 députés LR savent le rôle pivot qu’ils peuvent jouer pour faire passer cette réforme. Prise en compte des carrières longues et des carrières hachées des femmes, clause de revoyure en 2027, report de l’entrée en vigueur de la réforme, sont autant de points principaux que Les Républicains entendent défendre lors du débat sur la réforme des retraites.

Mais le point qui fâche pour une partie de ces députés de droite, est la situation des assurés ayant commencé à travailler tôt, entre 16 et 20 ans, et qui vont devoir cotiser 44 années pour partir à l’âge légal de 64 ans. “Le groupe Les Républicains souhaite que cette injustice soit corrigée à l’occasion de cette réforme“. Pour cela, il propose un amendement visant à donner “la primeur au respect de la durée de cotisation totale, c’est-à-dire les 172 trimestres. Ainsi, personne ne devra cotiser plus de 43 années“, indique t-il.

Carrières longues

C’est sans doute le point qui cristallise le plus une partie des députés Les Républicains. Le groupe souhaite “que cette injustice soit corrigée à l’occasion de cette réforme“. L’amendement déposé à cet effet vise à donner “la primeur au respect de la durée de cotisation totale, c’est-à-dire les 172 trimestres. Ainsi, personne ne devra cotiser plus de 43 années“, précise LR. Un amendement de repli est même prévu, en cas d’échec. Il impliquerait pour le gouvernement de remettre au Parlement,  “dans un délai de deux mois, un rapport précisant les moyens mis en œuvre pour qu’aucun assuré ne doive cotiser plus de 172 trimestres afin de pouvoir partir à la retraite.“

Carrières hachées des femmes

Un des amendements déposés par le groupe LR, vise à ce que soient mieux prises en compte les carrières discontinues des femmes, “en permettant leur départ à 66 ans à taux plein, plutôt qu’à 67 ans, à partir de deux enfants.“

Régimes spéciaux

Un autre amendement Les Républicains entend imposer aux régimes spéciaux, un décalage progressif de l’âge légal de départ à la retraite : deux ans pour les assurés nés entre 1961 et 1981, quatre ans pour ceux nés entre 1981 et 2005. La droite souhaite enfin décaler la mise en application du report de l’âge légal à 64 ans au 1er janvier 2024, plutôt qu’au 1er septembre 2023 comme prévu par la réforme du gouvernement.

Clause de revoyure en 2027

Les députés du groupe LR souhaitent également que le passage à l’âge de départ à 64 ans soit confirmé par une loi “au deuxième semestre de 2027“. Pour cela, ils demandent qu’une“clause de revoyure concernant le relèvement de l’âge légal de départ à la retraite à 64 ans“, soit intégré dans le texte.

Des amendements consensuels du camp présidentiel

Du côté de la majorité présidentielle, quelque 178 amendements au projet de réforme, ont été déposés. Alors que le Modem a retiré son amendement sur les “35 heures et 30 minutes“,  les amendements du groupe Renaissance et de ses alliés restent assez consensuels. Parmi les modifications proposées, la possibilité pour les enseignants de maternelle et de primaire de partir à la retraite dès qu’ils atteignent l’âge légal. Et ce, sans avoir à attendre la fin de l’année scolaire. Autre piste proposée pour les sapeurs pompiers volontaires : le bénéfice de trois trimestres supplémentaires, au-delà de 10 ans de service.

Atténuer l’impact de la réforme pour les femmes

L’impact de la réforme concernant les femmes a toutefois inspiré certains groupes et députés de la majorité qui entendent en corriger les effets négatifs de la réforme, dès l’examen en commission des affaires sociales.. Les députés du groupe Horizons proposent ainsi de changer le mode de calcul de la pension de retraite, actuellement basé sur le trimestre, en lui préférant le mois. Une mesure qui selon eux permettrait notamment de mieux prendre en compte les carrières hachées des femmes.

Mais dans ce registre, le groupe Démocrate (MoDem et apparentés) est celui qui propose le plus d’amendements, et sans doute la proposition la plus audacieuse. Un des amendements déposés vise à abaisser de deux trimestres l’âge légal de départ en retraite par enfant, dans la limite de huit trimestres, soit deux ans. Ce qui permettrait aux femmes ayant eu des enfants de partir en retraite avant l’âge légal de 64 ans. Autre proposition : intégrer un trimestre par enfant pour le calcul de la surcote, dans la limite de quatre trimestres.

Du côté de Renaissance, le parti présidentiel, plusieurs députés entendent également agir sur l’impact qu’aurait la réforme pour les femmes. Un amendement propose ainsi d’abaisser jusqu’à un an l’âge légal de départ à la retraite pour les femmes ayant eu un enfant. Toujours concernant les femmes, un amendement de la députée de la 12ème circonscription de Paris, Fanta Berete vise à porter la majoration de pension prévue pour le troisième enfant à 15 % pour la mère et 5 % pour le père, afin d’établir une “plus grande équité dans la répartition des majorations de pension entre femmes et hommes“, notamment pour les mères isolées, indique le texte déposé.

Le RN fait bande à part

Du côté du Rassemblement National (RN), le groupe ne totalise que 75 amendements, soit moins que le nombre de ses députés. L’essentiel n’est pas là pour la chef de file du RN, pour qui la méthode de contestation au sein de l’hémicycle se fera différemment de la Nupes. “L’opposition ne se mesure pas au nombre d’amendements, surtout quand ce sont des amendements aussi grotesques que ceux qui ont été déposés par la France Insoumise“, a indiqué ce dimanche Marine Le Pen, depuis son fief de Hénin-Beaumont. “Nous on n’est pas là pour faire du chiffre, on est là pour défendre les intérêts des Français. Les 75 amendements que nous déposons visent à atténuer la gravité de cette réforme pour les Français. Ils peuvent compter sur nous, nous on fait un travail sérieux“, a-t-elle ajouté.

 

 

Classé dans Actualité parlementaire, Réforme des retraites.

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *