Entrée au Panthéon de Missak Manouchian

Quand :
21/02/2024 Jour entier
2024-02-21T00:00:00+01:00
2024-02-22T00:00:00+01:00
Où :
Panthéon
Pl. du Panthéon
75005 Paris
France

80 ans jour pour jour après son exécution et celle de ses 23 compagnons d’armes, le résistant d’origine arménienne Missak Manouchian entre au Panthéon ce mercredi 21 février, accompagné de son épouse Mélinée. Comme pour Simone Veil et son époux Antoine, entrés au Panthéon en 2018, la famille souhaitait que le couple Manouchian reste uni dans la mort. Mélinée Manouchian y entrera donc avec son mari Missak, même si la résistante ne sera pas elle-même panthéonisée.

Aucune figure de la résistance communiste, et a fortiori aucun résistant étranger, n’avait eu droit jusqu’ici à cet honneur, contrairement à la résistance gaulliste, avec la panthéonisation dès 1964 de Jean Moulin. “Soixante ans après Jean Moulin, la panthéonisation de Missak Manouchian et de ses camarades est un acte de reconnaissance des FTP-MOI [Francs-tireurs partisans – main-d’œuvre immigrée] et de tous ces juifs, Hongrois, Polonais, Arméniens, communistes, qui ont donné leur vie pour notre pays“, déclare à ce titre Emmanuel Macron dans une interview accordée le 19 février au quotidien l’Humanité. “C’est une façon de faire entrer toutes les formes de la Résistance intérieure, dont certaines trop longtemps oubliées“, a souligné le chef de l’État.

Avec l’entrée de Missak Manouchian au Panthéon ce 21 février, c’est donc toute la résistance étrangère qui est célébrée. Réfugié en France après le génocide perpétré par les troupes ottomanes et qui l’avait fait orphelin, en 1915, alors qu’il n’avait que 9 ans, Missak Manouchian rejoint la Résistance en juin 1941. Le couple qui entre alors dans une totale clandestinité, bascule dans l’action armée en 1943, au sein des FTP-MOI. Au nombre de 23, les membres du réseau Manouchian, multiplient les attentats.

Cette “armée du crime“,  comme l’avait baptisé l’occupant nazi, venaient des quatre coins de l’Europe. Espagne, Hongrie, Pologne, Roumanie, Arménie. Ses membres rendus célèbres par l’affiche rouge furent traqués sans relâche par les brigades spéciales de la police française jusqu’à leur arrestation. Capturé le 16 novembre 1943. Missak Manouchian est exécuté le 21 février 1944 au Mont-Valérien avec 24 autres résistants, dont 21 membres de la MOI. Au petit matin, dans une cellule de la prison de Fresnes, le résistant prend une dernière fois la plume et écrit ces derniers mots à Mélinée, son épouse : 21 février 1944, Fresnes“ “Ma chère Méline, ma petite orpheline bien aimée. Dans quelques heures je ne serai plus de ce monde. On va être fusillé cet après-midi à 15 heures.“

Une première cérémonie mémorielle au Mont-Valérien

Mardi soir, plusieurs centaines de personnes se sont aussi réunies au Mont-Valérien, où le cercueil de Missak Manouchian a emprunté, dans une ambiance empreinte d’émotion, le chemin des derniers moments du condamné. Avant de reposer pour la nuit dans la crypte du Mémorial de la France combattante.

L’hommage de la Nation au Panthéon

Inhumés aujourd’hui au cimetière parisien d’Ivry, les cercueils de Missak Manouchian et de son épouse Mélinée remonteront à 18h30 la rue Soufflot, couverts d’un drapeau français, portés par des soldats de la Légion étrangère, qui ont aussi fait le choix de la France. Un parcours de lumière, aux tonalités bleu, blanc et rouge, pavera le chemin du résistant pour scander les trois grandes périodes de sa vie : le génocide arménien, l’arrivée en France et la Résistance. Au pied du Panthéon, sur lequel est prévu un spectacle son et lumières de plus de sept minutes.

Le cercueil fera ensuite son entrée dans le Panthéon, avec en fond sonore la musique du compositeur français Pascal Dusapin. A l’intérieur de l’édifice républicain, juste devant l’autel de la Convention nationale, le chef de l’État prononcera l’oraison funèbre de Missak Manouchian, devant le cercueil, placé au centre. Des temps d’expressions artistiques sont prévus, notamment la reprise par Arthur Téboul, leader du groupe Feu! Chatterton, du poème d’Aragon “Strophes pour se souvenir“ , chanté par Léo Ferré dans “L’affiche rouge“. Une “réinterprétation moderne et extrêmement forte“, promet un conseiller élyséen. Le chanteur Patrick Bruel lira également la dernière lettre du résistant à sa bien-aimée

A l’issue de la cérémonie, vers 20 heures, les restes du couple Manouchian rejoindront le caveau numéro XIII de la crypte du Panthéon, où le tombeau de l’écrivain Maurice Genevoix et le cénotaphe de l’actrice et résistante franco-américaine Joséphine Baker se trouvent déjà. A l’entrée, une plaque sera installée en l’honneur de leurs 22 autres camarades FTP-MOI ainsi que de leur chef Joseph Epstein. Trois vers d’Aragon et un morceau de la dernière missive de Missak y seront également gravés.

2000 invités

2.000 seront présentes à la cérémonie au Panthéon, parmi lesquelles de nombreuses personnalités, notamment issues de la communauté arménienne en France, comme Robert Guédiguian, réalisateur de L’Armée du crime. Quelque 150 journalistes et 600 scolaires qui ont travaillé sur la figure du résistant communiste, sont  également attendus. Parmi les invités, les responsables du Parti communiste, le Premier ministre arménien Nikol Pachinian et de nombreux représentants de la communauté arménienne. De nombreux politiques viendront également rendre hommage à Missak Manouchian, dont Marine Le Pen. La présidente du groupe RN à l’Assemblée nationale, invitée ès qualités, a fait savoir qu’elle entendait bien se rendre “à la cérémonie d’hommage solennel de la Nation“ à Missak Manouchian, malgré les réserves émises par le chef de l’État. “ Comme pour l’hommage à Robert Badinter dont les élus du RN étaient absents, l’esprit de décence, le rapport à l’histoire devraient les conduire à faire un choix. Les forces d’extrême droite seraient inspirées de ne pas être présentes, compte tenu de la nature du combat de Manouchian“, a déclaré Emmanuel Macron dans son entretien au quotidien l’Humanité.

Une présence jugée “insupportable“  par les membres du comité de soutien pour l’entrée au Panthéon du résistant communiste même s’ils respecteront les usages institutionnels. Georges Duffau-Epstein, fils de Joseph Epstein, le chef des Francs-tireurs partisans (FTP) pour la région parisienne arrêté en même temps que Manouchian et qui entrera de façon symbolique au Panthéon avec l’inscription de son nom sur une plaque, a aussi déclaré qu’elle n’était “pas la bienvenue“ et qu’il ferait tout “pour l’éviter“ mercredi.

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