Examen de deux motions de censure

Quand :
03/03/2020 Jour entier
2020-03-03T00:00:00+01:00
2020-03-04T00:00:00+01:00
Où :
Assemblée nationale
126 Rue de l'Université
75007 Paris
France

Après l’annonce, par le Premier ministre samedi, d’un recours au 49.3 pour adopter le projet de loi de réforme des retraites à l’Assemblée, les oppositions, de droite comme de gauche ont unanimement condamné cette méthode. Dès samedi, les députés LR d’un côté et les députés de gauche de l’autre (LFI, GDR et PS), ont déposé deux motions de censure. Elles seront débattues jusque tard dans la soirée après une séance de questions au gouvernement. Les motions feront l’objet d’une discussion commune lancée par Damien Abad (LR) et André Chassaigne (PCF). Suivront les autres chefs de file des groupes politiques. Avant les votes sur chacune dans la soirée, le Premier ministre donnera la réplique.

Une motion propre pour la droite

« Les députés Les Républicains ont déposé une motion de censure contre le gouvernement, qui a engagé sa responsabilité via le 49-3 pour faire passer sa réforme des retraites », a indiqué samedi leur chef de file, Damien Abad. Cette motion, « au nom du groupe LR« , « vient d’être déposée« , a déclaré le patron du premier groupe d’opposition. « Nous avons refusé tout velléité de motion commune » avec la gauche, a-t-il ajouté.

Trois groupes de gauche derrière la motion de gauche

L’épisode aura eu l’avantage de ressouder, au moins temporairement, la gauche. Les groupes LFI, PS et PC se sont mis d’accord dès samedi soir pour déposer ensemble leur propre motion de censure.  « Il a été extrêmement facile de trouver une stratégie commune entre-nous », s’est félicité le socialiste David Habib. Les trois groupes de gauche à l’Assemblée ainsi que la députée Jennifer de Temmerman (non-inscrite, ex-LaREM), soit 63 députés, dénoncent dans cette dernière, « un gouvernement qui piétine la procédure parlementaire ». « L’héritage du Conseil national de la résistance ne peut ainsi être remis en question » par cette réforme prévoyant un système universel de retraite par points », proclament-ils aussi.

Ces deux motions de censure, auxquelles Edouard Philippe devra répondre mardi, ne menacent en rien son gouvernement. Compte tenu du poids de la majorité, elles n’ont en effet pas de chance d’aboutir. Et ce, même si le Rassemblement National (RN) a affiché son intention de les voter. « Il faut déposer une motion de censure, nous n’avons pas la capacité car nous n’avons pas de groupe, mais nous voterons toutes les motions de censure qui seront présentées, quelle que soit leur origine », a annoncé samedi sur franceinfo, la présidente du RN, Marine Le Pen, après l’annonce du Premier ministre de recourir à l’article 49.3.

Un débat qui s’annonce animé

Les débats à l’Assemblée s’annoncent pour le moins animés. À droite comme à gauche, les députés de l’opposition ne décolèrent pas. « Il était inimaginable – et pourtant ils l’ont fait – de faire voter un texte comme celui-là sans le volet financier », s’étouffe le député LR, Éric Woerth. Damien Abad, le président du groupe LR qui défendra la motion de censure de droite, est tout aussi remonté : «  dégainer le 49.3 un samedi après un conseil des ministres extraordinaire qui devait être consacré à l’épidémie c’est se moquer du monde ». « Edouard Philippe a fait voler en éclat le consensus national » a lancé le parlementaire samedi, à l’annonce du recours au 49.3. Coup de colère également du chef de file des Insoumis, sur le passage en force du gouvernement « C’est un procédé particulièrement fourbe […] » a indiqué M. Mélenchon.

Motion de censure : comment ça marche ?

Prévue à l’article 49-2 de la Constitution, la motion de censure permet à l’Assemblée nationale de « mettre en cause la responsabilité du gouvernement« . Elle doit être signée par au moins un dixième des députés (soit 58).  Ce qui a été une formalité pour le groupe LR (104 membres),  mais a nécessité, pour les Insoumis, socialistes et communistes, d’unir leurs forces. Pour être adoptée, la motion de censure doit recueillir la majorité absolue des membres de l’Assemblée, soit au moins 289 suffrages favorables. Car seules ces voix « pour » sont comptabilisées. On considère en effet que même les députés qui s’abstiennent soutiennent le gouvernement.

Reste qu’aucune de ces motions n’a quasiment aucune chance d’être adoptée. Le pouvoir constitutionnel de renverser un gouvernement se heurte en effet à une réalité arithmétique. La majorité LaREM-Modem truste 345 sièges (299 + 46) de l’hémicycle, tandis que l’opposition ne rassemble que 214 députés. Et encore, si l’on compte le groupe UDI -Agir (27 membres), qui n’est pas parti pour voter « pour ». L’Assemblée n’est d’ailleurs parvenue qu’une fois, sous la Ve république, à renverser le gouvernement. C’était en 1962, contre le gouvernement de Georges Pompidou.

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